Marseille, de 1973 à aujourd’hui, une histoire locale du racisme

29 août 2020brève, Radio

Union Urbaine est une association montpelliéraine des cultures urbaines qui produit des documentaires (sur le futsal entre autres), des reportages, des vidéos, qui anime des entretiens et des ateliers de formation. Elle a organisé en juillet dernier une rencontre – discussion autour de Marseille 73 avec Kevin Vacher, un jeune trentenaire sociologue, membre de collectifs militants dans les quartiers populaires de Marseille, et moi, la romancière septuagénaire. Deux heures et demie de discussion dont Union Urbaine a sorti sept podcasts de dix à vingt minutes chacun.







J’ai beaucoup aimé cette rencontre, dont je choisis de sortir un thème central. Celui du rapport entre nos deux générations. La mienne s’ancre dans la guerre d’Algérie, la défaite du colonialisme français comme un moment phare du vaste mouvement de libération des peuples des années 60. Une génération qui, après bien des combats, et bien des succès, a finalement été défaite dans les années 80, avec le triomphe de Reagan et le trompe l’œil mitterrandien. Et elle n’a pas su transmettre son héritage dit Kevin Vacher : sa génération à lui n’a ni événement fondateur ni patrimoine sur lesquels s’appuyer, et cherche à tâtons. Mais peut-on transmettre quand on perd ? Peut-on transmettre quand aucun courant politique stable ne prend en charge l’héritage ?

Au cours de la discussion, nous notons à quel point la situation est différente pour l’extrême droite française. La vieille extrême droite antisémite est mise en veilleuse. Celle qui nait de la guerre d’Algérie s’ancre sur la négation de la défaite, la haine de l’ennemi arabe, l’héritage de l’OAS, et la culture de la masse des Pieds Noirs déracinés de retour d’Algérie. Le Front National est créé en 1972 sur ce patrimoine, il le fait suffisamment prospérer depuis pour parvenir à le transmettre d’une génération à l’autre.

Ce thème n’est bien sûr pas le seul que nous ayons abordé. Mais c’est celui que j’ai choisi de retenir pour présenter ce débat, parce qu’il dit fort ce qu’est Marseille 73, un récit pour faire le lien, par delà les défaites, avec les tâtonnements et les espoirs d’aujourd’hui.

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